Dans la partie de la présente note qui se rapporte à la nature des terrains il a déjà été fait allusion aux caractéristiques auxquelles devaient répondre le matériel utilisé pour excaver et mettre en dépôt les terrains.
L’économie de l’entreprise qui comportait un volume de 7.600.000 m3 dont 6.200.000 m3 devaient provenir de la tranchée à ouvrir sur une longueur de 2400 mètres, le complément de 1.400.000 m3 provenant du creusement de la cunette principalement sur une longueur de 2800 mètres de canal faisant suite à la tranchée, fut axée sur l’emploi , simultanément avec des draglines de deux engins de terrassement dont ce fut la première utilisation en Belgique.
Ils consistaient d’une part en un excavateur à godets d’un type spécial et d’un remblayeur. Ces engins, de conception étrangère sont entre autres utilisés sur une grande échelle dans les mines de lignite de la vallée du Rhin pour l’enlèvement préalable des terrains morts qui représentent un volume important. Dans ces mines, ces engins atteignent des rendements horaires pratiques impressionnants de 1500 m3.
Excavateur à godets de 350 tonnes.
L’excavateur susceptible d’attaquer, en butte et en rétro sur 11 mètres de hauteur, s’appuie sur trois chenilles d’une surface portante totale de 27 mètres carrés. Deux chenilles sont motrices et peuvent tourner, la troisième jouant le rôle de roue libre. Cette disposition permet des déplacements importants du centre de gravité de l’appareil sous l’action des charges dues aux irrégularités des voies en même temps qu’elle ramène la pression sur le sol à une valeur qui offre toute sécurité contre des risques d’éboulements ou de glissements des talus qui entraineraient le basculement de la machine.
L’enfin se compose :
- D’une couronne dentée sur laquelle repose la plateforme supérieure de telle manière que le centre de gravité tombe entre les trois chenilles.
- D’une plateforme supérieure montée d’une façon spécialement rigide. Le mouvement circulaire de la partie supérieure est commandé par deux axes verticaux montés de façon à ce que les deux pignons d’attaque actionnent simultanément et avec la même force la couronne dentée. Les deux axes sont commandés par une boite de transmission et un moteur électrique.
- D’une chaine de godets, en plusieurs éléments raccordés par des charnières. La partie supérieure, raccordée à la plateforme supérieure, constitue la « goulotte d’entrée ». Celle-ci ainsi que les autres parties de la chaine sont accrochées à des élingues soutenues par une bigue. La goulotte peut être remontée à 2 mètres au-dessus du terrain. La partie moyenne de la chaine est encore divisée en deux parties. La partie inférieure aplanit le terrain. Elle est actionnée par un moteur électrique. La longueur de la chaine atteint 16 mètres et elle comporte 37 godets de 300 litres. La vitesse de 33 godets par minute offre une capacité horaire optimum de 600 mètres cube en 24 heures de travail continu soit un rendement journalier de 14.400 mètres cubes.
- De rubans transporteurs. Le premier ruban intermédiaire, ruban récepteur reçoit les terres des godets et les conduit vers le second ruban transporteur qui est mobile. Le ruban intermédiaire a 1 mètre de largeur, sa vitesse est de 1,50 mètre par seconde. Le ruban transporteur est mobile et susceptible de pivoter de 210 degrés autour de l’axe de l’excavateur à raison de 105 degrés vers la droite ou vers la gauche. Sa largeur est d’un mètre et sa vitesse de 2,50 mètres par seconde, sa longueur totale est de 17,50 mètres à partir de l’axe de rotation. L’accouplement différentiel à l’aide de moteurs électriques sur la boite de transmission du mécanisme de rotation permet automatiquement à la glissière une position stable pendant que toute la plateforme supérieure se déplace par rotation.
Pendant le travail de creusement la plateforme se place normalement à 90 degrés et le préposé qui dirige la glissière au-dessus des wagons n’est pas gêné. Il peut faire pivoter le ruban transporteur jusqu’à 105 degrés de l’axe de la machine. Au-dessus de 105 degrés, un déclenchement automatique le prévient de la fausse manœuvre. Un autre dispositif de sécurité interrompt automatiquement la transmission lorsque le couple dépasse une valeur déterminée.
- D’une chambre des machines placée sur le côté de la plateforme supérieure et nantie d’une suspension anti-vibrations. Un groupe diesel-électrique composé d’un moteur diesel de 530 CV accouplé à un alternateur de 400 kVA 380 Volts courant alternatif se trouve dans cette chambre.
Le diesel est muni d’un compresseur pour le démarrage. Dans la même chambre se trouve également un diesel auxiliaire de 60CV servant à l’éclairage de secours, actionne les pompes à air du gros diesel en même temps que le compresseur de la vanne du déversoir.
- De deux postes de commande d’où il est possible d’observer le fonctionnement du transporteur et de l’excavateur et qui sont situés à gauche et à droite de la chaine à godets, permettant au conducteur de les utiliser simultanément suivant la direction de la chaine.
- D’une chambre, au-dessus de la superstructure qui contient des treuils électriques commandant les différentes articulations des élingues. Dans cette chambre se trouvent également les appareils de commande à distance. A côté se trouve la caisse contenant 30 tonnes de ballast.
- La sécurité de la marche de la machine est assurée à l’aide de boutons déclencheurs se trouvant à différents endroits où de nombreux dispositifs de sécurité et de verrouillage sont disposés de façon à assurer la coordination des différents mouvements et à éviter de fausses manœuvres.
La conduite de la machine est assurée par un conducteur, un machiniste, un graisseur et un préposé à la direction de la glissoire.
Remblayeur de 220 tonnes.
Le remblayeur circule sur une double voie d’un écartement de 90 cm.
L’engin se compose :
- De trois châssis roulants dont un à trois axes et deux à quatre axes. Ils sont actionnés par un moteur électrique avec accouplement différentiel. L’écartement de chaque voie est de 90 centimètres et la machine repose sur vingt-deux roues. Le poids en service étant de 220 tonnes, la pression par roue est de 10 tonnes. La vitesse de déplacement de la machine est de 5,5 mètres par minute qui s’adapte le mieux à une desserte par wagons d’une contenance de 16 mètres-cubes.
- D’une plateforme qui se pose par articulation sur chaque châssis, plateforme qui vise à répartir uniformément les charges. Le châssis soutenant le moteur est attaché sur l’un des côtés tandis que le mouvement de la chaine à godets est monté dans la superstructure. L’axe vertical autour duquel tourne le ruban transporteur est monté du côté des deux châssis en face de la chaine.
- D’une chaine à godets guidée par une double roue conductrice de 2,50 mètres de diamètre qui reprend la matière amenée par les wagons et qui doit être mise en dépôt dans le remblai. Les terres sont basculées dans le fossé ainsi creusé puis reprises par les godets de la chaine et conduites à une hauteur de 20 mètres par un ruban transporteur. La force du moteur actionnant la chaine est de 100 CV. La chaine possède 19 godets de 300 litres. La vitesse étant de 33 godets par minute, le rendement horaire normal est de 600 mètres cubes, analogue à celui de l’excavateur.
- D’un ruban transporteur d’une largeur de 1 mètre qui pivote de 210 degrés à raison de 105 degrés à gauche et de 105 degrés à droite autour d’un axe vertical et se déplace à une vitesse de 3 mètres par seconde.
La longueur entre l’axe de rotation et l’axe du tambour supérieur est de 35 mètres. Le contrepoids du ruban atteint 35 tonnes et le moteur qui l’actionne a une forme de 75 KW.
La hauteur de chute des matériaux au-dessus du terrain actuel atteint 15 mètres.
- D’une chambre de machines équipée d’un moteur diesel de 375 CV qui actionne une dynamo de 300 kVA 380 volts à courant alternatif. Le moteur actionnant toute l’installation démarre à l’air comprimé fourni par des pompes actionnée par un diesel auxiliaire.
- D’une cabine de commande montée à côté de la chaine à godets de man !ère à assurer une parfaite visibilité du machiniste commandant l’installation.
La conduite de l’engin est assurée par un machine, un mécanicien, un graisseur, un ouvrier commandant la giration du ruban et un manœuvre.
Wagons
Les wagons utilisés étaient à basculement automatique et d’une capacité de 16 m3.Ils formaient des rames de 4 à 5 wagons suivant l’inclinaison des rampes ou l’état des voies de roulement.
Le rendement moyen journalier de l’installation, par journée de trois équipes travaillant chacune 8 heures dans des conditions normales a été de 10.000 m3. Il n’a jamais atteint le rendement de 14.400 m3 dont les engins étaient théoriquement capables.
On rappellera ici qu’aux travaux de creusement des tranchées du canal Albert entre Lanaye et Lanaeken, des rendements de 37.800 mètres cubes par journée de trois équipes travaillant chacune 8 heures furent atteints.
Le dispositif adopté aux travaux du canal de Charleroi à Bruxelles ne supportait aucun arrêt de l’excavateur. Or, pour une entreprise de travaux publics en plein air des arrêts sont inévitables. Et dans l’entreprise considérée, des arrêts furent souvent constatés par insuffisance du nombre de wagons utilisables ce qui s’est marqué dans la chute de rendement, les engins de terrassements tant à l’attaque qu’à la décharge s’étant fort bien comportés.
Dans la pratique le remblayeur a été utilisé pour la mise en dépôts de produits provenant d’autres engins de terrassement utilisés dans les limites du chantier.
L’expérience a cependant démontré que le remblayeur ne pouvait en aucun cas jouer un rôle dans la stabilisation des terrains à remblayer.
Voir aussi
- Tracé et caractéristiques du canal primitif
- Transformations successives de l’ouvrage
- Imperatif des travaux de modernisation
- Sondage de reconnaissance des terrains
- Etude géologique détaillée
- Hydrologie des terrains traversés
- Essais physiques et mécaniques des terrains
- Détermination du profil
- Exécution des travaux de terrassements
- Décharges
- Travaux complémentaires
- Importance des travaux