Le nouvel ouvrage fut établi parallèlement au tunnel à petite section de la “Bête Refaite”, à environ 400m de ce dernier, en 1885.
Le tunnel de “Bête Refaite” laissait le souvenir d’une entreprise difficile, dangereuse et coûteuse, les multiples embûches rencontrées lors de sa construction trouvant leur origine dans la nature du terrain traversé.
Le nouveau souterrain n’allait pas échapper à la configuration géologique peu propice de la crête de partage. En effet, le tunnel devait être creusé dans des sables fins argileux du terrain yprésien supérieur, connus sous le nom d’argile de Morlanwelz.
Ces sables argileux, qui étaient presque imperméables au niveau de la base du tunnel, étaient par contre altérés par les eaux et fluants au niveau de la voûte.
Cette particularité se présentait surtout pour la moitié nord du tunnel, où les sables aquifères, d’une grande finesse, furent au cours des travaux entraînés par les eaux d’infiltration dans la galerie d’assèchement, en produisant dans la colline des vides en forme d’entonnoirs qui débouchaient à la surface du sol, autrement dit, provoquant des fondis identiques à ceux que VIFQUAIN avait combattus 53 ans auparavant.
La nature aquifère des terrains traversés exigea donc le creusement préalable d’une galerie d’assèchement de 1,80 m de hauteur sur 1 m de largeur établie sur toute la longueur du tunnel approximativement au niveau du radier avec une faible pente longitudinale vers Bruxelles.
Pour l’exécution proprement dite du tunnel, la “méthode belge” fut utilisée, c’est-à-dire, la technique qui consiste à percer le souterrain de haut en bas, en progressant de la voûte vers le radier.
Pour le tunnel de Godarville, une petite galerie de calotte fut creusée préalablement; ensuite elle fut approfondie jusqu’au niveau des naissances de la voûte en plein cintre. Par après, l’excavation fut élargie par soutènement des terres au moyen de boisages disposés en éventail.
L’établissement des pieds droits se fit par reprises en sous oeuvre. Une large galerie centrale de 3,75 m fut, à cet effet, descendue en deux étapes jusqu’au niveau du radier, en incorporant la galerie d’assèchement dont il a été fait mention plus haut.
Des excavations alternées furent ensuite creusées latéralement sur des longueurs plus ou moins grandes variant avec la nature du terrain rencontré. Elles furent solidement boisées de façon à pouvoir exécuter, en une fois, le pied droit sur toute sa hauteur, c’est-à-dire, 2 m depuis la fondation jusqu’aux naissances de la voûte en plein cintre. La section de l’ouvrage fut complétée en dernier lieu par l’exécution du radier en voûte renversée.
Ces travaux avaient été précédés par l’exécution de cinq puits, dont deux, établis à l’aplomb de l’ouvrage, furent maintenus pour la ventilation.
Le tunnel avait une longueur de 1.050 m et présentait une section intérieure de 8 m de largeur et de 9 m de hauteur sous clef, ce qui correspondait à une section libre de 62,75 mètres carrés. La section mouillée était de 21 mètres carrés.
A titre de comparaison, le tunnel de “Bête Refaite” mesurait 1.267 m et avait une section de 16 mètres carrés, pour une section mouillée de 7,2 mètres carrés.
Le creusement du tunnel avait exigé des déblais sur 11 m de largeur et 11 m de hauteur sous clef : ils atteignaient au minimum 110 mètres cubes par mètre courant (à titre de comparaison, la réalisation du canal actuel à 1.350 tonnes a nécessité un volume de déblais en tranchée de 7.000 mètres cubes par mètre courant). Le volume des maçonneries de briques était de 48 mètres cubes par mètre courant.
Les deux têtes du tunnel de Godarville furent pourvues de portes que l’on fermait aux époques de froid rigoureux pour soustraire, autant que possible, les maçonneries de revêtement de l’ouvrage d’art aux atteintes du gel et empêcher la formation de glaces. En outre, un double jeu de poutrelles permettait de barrer le tunnel à chacune de ses extrémités de façon à pouvoir, si nécessaire, assurer sa vidange sans devoir mettre à sec le restant du bief de partage.
Le coût du tunnel de Godarville s’est élevé à 2.694.000 francs, soit 2.566 francs par mètre courant.
L’Administration des Ponts et Chaussées avait laissé la liberté de choix dans le mode de traversée de la crête de partage.
La solution du souterrain fut retenue vraisemblablement à cause de l’expérience acquise durant les décennies écoulées.
- Description du tunnel de Godarville
- Construction du tunnel
- Le tunnel de Godarville en photos anciennes
- Le tunnel de Godarville en photos récentes