Entre 1600 et 1610, la cour d’Haurut améliore sa situation en faisant rentrer dans le domaine une cinquantaine de bonniers ronquiérois.  Pendant les années 1673 – 1676, l’abbaye perd ses revenus ronquiérois qui sont confisqués par les autorités espagnoles (signalons que les biens d’Hennuyères n’ont pas souffert de ces dommages). Après la guerre, les revenus confisqués auront sans doute été restitués à l’abbaye.

Les français font la conquête du pays et vont consommer la ruine de Cambron par les contributions de guerre.

Le 23 vendémiaire an III (14 octobre 1794) une contribution de trois millions de livres est imposée à Nivelles et le Brabant Wallon.

Le magistrat de Nivelles fixe la répartition suivante : Cambron pour cinquante mille livres. L’abbaye a dû vendre 60 bonniers dont 9 journels de pré sous champs marais à Ronquières.

L’adjudication définitive eut lieu le 18c décembre 1794 chez la veuve d’Augustin Bouchy, cabaretière à Ronquières par le notaire Hugues-Joseph Champagne de Rebecq au profit de dix particuliers du village et environs.

Le domaine fut vendu le 18 fructidor an VIII ( 5 septembre 1800). Par cette liquidation définitive, ce démembrement permit la construction actuelle du village et d’une douzaine d’exploitations agricoles particulières dont deux grandes fermes, Haurut 80 hectaures et Tombois 65 hectares, 6 belles fermes de plus ou moins trente hectares : Malmaison, Quesnois, Queuwettes, Belle Maison, Lelièvre, Rosy et Nicaise et une modeste ferme de 12 hectares plus trois exploitations de 2 à 3 hectares au bois d’Haurut.

L’Hobette

L’Hobette était une petite ferme de 6 bonniers et demi avec deux bêtes à cornes. Pendant des siècles et jusqu’en 1876, elle demeura la propriété d’une seule famille. Elle fut alors expropriée pour y tracer la rue conduisant à la gare de chemin de fer dont l’exploitation commença en 1884. Cette rue qui s’appelait rue de la station porte aujourd’hui le nom  de rue Jules Dekeyn.

Le plus ancien occupant que nous ayons repéré fut Charles Delalieu qui épousa en 1662 Marguerite Taminiau.

En 1663, naquit une fille nommée Marguerite. Elle épouse à l’age de 22 ans en 1684 Jules Delescolle, dont elle eut dix enfants. Parmi eux, il y eut Philippe qui fut clerc jusqu’à sa mort en 1730. Marguerite succéda à ses parents à l’Hobette.

En 1740, elle épousa Quintin Carrière, tailleur de pierres dont elle eut 5 enfants. Etienne, né en 1742, entra chez les Minimes à Bruxelles, et Jean-Joseph, né en 1744 succéda à ses parents à l’Hobette.

En 1786, Jean Joseph épousa Marguerite Seutin. Ils eurent cinq enfants dont Léopoldine. Cette dernière épousa Constantin Favresse dont naquit Camille Favresse en 1838.

Enfin, en 1866, Camille épouse Domitelle Robert d’Ittre qui lui donna neuf enfants : Jules, Juliette, Maria, Adolphe, Ida, Odile, Anna, Achille et Emma.

Avec Camille Favresse disparut la petite ferme où prospérèrent de nombreux fermiers, au chevet de l’église. L’histoire de cette famille nous donne des renseignements intéressants sur les autres familles de cette époque.

La dot de Marguerite Delescolle

La dot que Marguerite Delescolle apporte à son mari Quintin Carrière est intéressante au sujet de la situation économique d’une petite ferme de Ronquières et témoigne d’une large aisance : trois cent florins en argent et cinquante florins pour ses habits, un lit de plumes, huit paires de draps de lit neufs, une nappe de quatre aunes, vingt serviettes, cent aunes de toile blanche, un coffre, une garde-robe, une couche, une couverture, une table carrée, un habit valant deux pistoles et enfin les habits et le linge pour son propre usage.

L’esprit religieux

L’esprit religieux apparaît dans le double fait que Philippe Delescolle était clerc et qu’Etienne Carrière, fils de Marguerite Delescolle et ainsi neveu de Philippe, se fit Minime au couvent de Bruxelles. Chassé de son couvent par les révolutionnaires en 1796, il se retira dans sa famille à Ronquières et y remplit les fonctions de vicaire. Il mourut en 1808.

La situation sociale

Enfin, l’honorabilité de la famille qui vécut pendant plusieurs siècles à l’Hobette apparut dans le fait que Constantin Favresse mourut en 1874, président de la fabrique d’Eglise et du bureau de bienfaisance.

Le passage à gué du moulin

En aval de la retenue d’eau qui actionne le moulin, entre ce dernier et la brasserie du Rouge Lion, sur la rive gauche de la Marck, un passage à hué est utilisé par les piétons et les véhicules qui ne veulent pas utiliser le pont du moulin. La retenue y raréfiait l’eau en période normale et le passage à pied y était facile.

Aujourd’hui encore il est aisé de constater l’existence de cet ancien passage à gué. C’est là une curiosité folklorique du vieux Ronquières.

La halle et la cantine

La partie de la halle transformée vers 1700 par Ghislain Baudet en écurie et en chambres devint ensuite une cantine qui fut celle des Tison.

Puis, successivement la maison dite « cantine de Pierre-Joseph Leclercq » et de Marie Fauconnier veuve Denis pour devenir enfin celle de Landercy. De Nicolas d’abord, d’Emile enfin.

La cantine de Nicolas Landercy

Nicolas Landercy, né à Ronquières en 1794 était tisserand de son métier. Il épouse en 1835 Marie Thérèse Delplisnaire qui lui donna entre autres enfants Céline qui épousa Léonard Rosy.

En 1840, naquit Emile qui épousa Mathilde Hubert et en 1844 Alice qui épousa Alexandre Sempos.

Nicolas Landercy appartenait à une famille de tisserands. Son frère Laurent, né en 1757, avait épousé en 1777 Marie-Joseph Joly et en seconde noce Marie-Joseph Antoine en 1793.

Son grand-père, Jean-François Landercy avait épousé en 1756 Marie-Adrienne Dechefd. Vers 1840, l’atlas cadastral Popp signalait à Fauquez le tisserand Hubert Landercy qui était cousin de Nicolas.

Soucieux de l’avenir de son fils Emile, Nicolas lui fit prendre un diplôme d’instituteur à l’école normale de Nivelles, ce qui, en 1865, lui valut la place de sous-instituteur d’Alexis Bomal, dont la cousine Sidonie était institutrice depuis 1840.

Après la mort d’Alexis Bomal en 1867, il le remplace comme clerc et comme secrétaire communal.

Avant de fonder un foyer, Emile Landercy voulut posséder une habitation. En 1865, il acheta pour 1500 francs à Victoire Denis l’une des deux demeures de l’ancienne cantine. Et, en 1875, il acheta l’autre partie pour 1800 francs rendant ainsi son unité ancienne à la cantine de Ghislain Baudet. C’est là qu’Emile installa son foyer en épousant en 1878 Mathilde Hubert de Bornival. Il avait 38 ans.

De ce mariage, naquirent six enfants : René en 1879, Fernand en 1881, Emile en 1882, Marthe en 1884, Alice en 1887, et Adèle en 1889.

Emile Landercy mourut prématurément en 1891. La veuve éleva sa nombreuse famille  dans la cantine reconstituée et qui sera désormais la maison de Mathilde du clerc. Elle mourut chez sa fille à Bruxelles âgée de plus de 100 ans.  Elle repose avec sa famille au cimetière de Ronquières.

La cantine des Tison

Après Ghislain Baudet, mort en 1712, la chambre et l’étable qu’il avait construits sur la partie orientale de la halle passa aux Tison qui en firent une cantine.

Elle eut un tel renom qu’elle donna son nom à toutes les maisons qui se succédèrent.

Ce qu’était cette cantine, les documents ne le disent pas, mais nous pensons que c’était une sorte de halle en miniature, une sorte de maison de commerce, comme le seront plus tard les cantines qui se perpétueront jusqu’à nous.

Tison avait épousé Anne-Marie Demoulin qui avait un fils nommé François. De ce mariage naquit une fille, Odile. Devenue veuve, elle se remariera à Jean-Baptiste Poullou et donne sa fille en mariage à Hubert Vermeulen.

Abraham Demoulin et son fils François habitaient le pays de Jumet. Et, de si loin, il était difficile de s’occuper de leurs intérêts ronquiérois et notamment de satisfaire Jean-Joseph Leclercq réclamant les urgentes réparations dont la maison avait besoin.

D’un commun accord, on trouve une solution satisfaisante dans le bail amphithéotique en 1758 qu’Odile Tison donna avec le consentement de sa famille à son locataire Jean-Joseph Leclercq. Odile Tison consentit à Jean-Joseph Leclercq un bail de 99 ans, moyennant une rente annuelle de cinq florins au denier vingt et moyennant l’engagement de bien réparer la cantine, d’en faire une habitation commode et de la maintenir en bon état pendant toute la durée du bail.

La situation juridique de la cantine était la suivante : la nue-propriété appartenait à Odile Tison et à ses héritiers.  L’usufruit appartenait à Jean-Joseph Leclercq.

La situation changea en 1774, après la mort d’Odile qui, par son testament, léguait tous ses biens ronquiérois au cousin Germain Demoulin qui acquérait ainsi la nue-propriété de la cantine.  L’usufruit continuait à appartenir au locataire.

La maison continua à s’appeler cantine bien qu’elle n’en fut plus une.

La cantine de Pierre Joseph Leclercq

Se sentant vieillir, Jean Joseph Leclercq voulut laisser à son fils Pierre Joseph qui était tailleur le bénéfice des restaurations qu’il avait faites à la cantine.

Il lui céda en conséquence le bail qu’il avait depuis 1758. L’acte constate que la cantine est devenue une habitation commode et confortable avec chambres hautes et basses. C’est-à-dire un rez-de-chaussée et un étage.  Pierre Joseph prend à sa charge sa maison avec le mobilier, c’est-à-dire avec ses chaises, sa table et sa commode. Il s’engage à payer la rente de 5 florins, à nourrir son père et à l’entretenir, à lui faire des funérailles décentes et à lui donner chaque semaine dis patards pour ses menues dépenses. Cette cession de bail est datée de 1786. Elle était encore valable en 1817. Pierre Joseph habitait toujours la cantine et y faisait le métier de tailleurs.

La cantine de Marie-Joseph Fauconnier, veuve Denis

Le 12 février 1817, Etienne François Denis, âgé de 21 ans, acheta au nom de sa mère Anne-Marie Fauconnier, veuve Denis, la maison dite cantine pour 51 florins et 99 cents.

Il racheta aussi pour 100 florins la rente de 5 florins dont elle était chargée.

La cantine tenait par devant à la place, par derrière à la grande maison de Gilles Taminiau et aux Vanderelst. Gilles Taminiau la tenait de  sa mère Marie Canart qui la tenait de ses parents François Pletinckx et Elisabeth Taminiau qui la tenait elle-même de Denis Taminiau et de Marie Taminiau.

Le vendeur était François Demoulin, fils d’Abraham. Il avait hérité en 1774 la nue-propriété de la cantine que possédait sa cousine Odile Tison.  Les Denis firent deux demeures avec une cour et un four commun, mentionnés dans les actes de partage de 1840-1848. La date de ces transformations est définie par les fenêtres en demi-cercle qui sont de même style que les maisons éclusières, bâties par les Hollandais avant 1830.

Les témoins de la Halle de Ronquières

La cour féodale du Brabant est le plus ancien témoin de la halle de Ronquières. Le 2 juillet 1526,le mayeur Bastin Antoine est ses échevins convoquent à la halle les cinquante notables du village en vue d’être autorisé par eux d’intenter un procès devant la cour féodale du Brabant pour forcer le seigneur d’Henripont Jacques de Hemptines à payer les tailles qu’il devait sur son fief ronquiérois de l’Escaille.

L’autorisation des notables était nécessaire parce que c’était eux qui devaient supporter les frais des procès.

Le procès fut entamé et perdu et les notables en supportèrent les frais. Comme à Braine-Le-Comte la halle de Ronquières servait entre autres aux assemblées de communautés. L’assemblée des échevins et des cinquante notables suppose une salle assez vaste. Vingt ans plus tard, la halle existe toujours. Le cartulaire de Cambron en 1548 voulait déterminer la propriété du greffier Jean Taminiau, située en face du porche de l’église. C’est le massif schisteux qui s’allonge de l’église à l’escavée et que masquent les maisons du Nord de la place et en particulier les brasseries de l’ange et du cerf.

Et cette délimitation de la halle sur la place, au centre même des affaires puisque le moulin, le tordoir et les brasseries avaient leur siège.

Enfin, nous savons que, vers 1700, le mayeur Ghislain Baudet construisit près de l’emplacement de la halle une grange, une étable et une écurie et, que pour ce faire, il lui fallut l’autorisation des seigneurs d’Enghien. Ce qui prouve que ceux-ci possédaient le haut domaine sur la halle.

Halle est synonyme d’activité économique dont elle engendre les mouvements et pulsations.

C’est une situation qui sort de la vie économique comme le fruit sort de la fleur. Si donc, Ronquières a voulu se donner une halle, c’est que sa vie économique le postulait.

Voyons donc quel en était à ce moment le mouvement des affaires ronquiéroises.

Ronquières était d’abord un pays de culture produisant en abondance des céréales panifiables et chacun sait que le commerce de blé intéressait fortement la halle. Le moulin ne se contentait pas de transformer le grain en farine, il faisait aussi le commerce du blé, de la farine et des succédanés.

Ronquières était encore un pays d’élevage. Il possédait de nombreux cheptels. Il est curieux de constater qu’une bête à l’engrais s’appelait « halle » et que l’élevage du bétail se disait « hallerie ». Il est permis de penser que cette dénomination fait penser que ces bêtes étaient destinées à être vendues à la halle.

La halle de Ronquières pouvait donc servir au commerce de grain et de viande de boucherie destinées à être vendues à la halle comme à celle de Braine-Le-Comte.

Ronquières avait aussi, dès le 13eme siècle, un « toreulier » ou stordoir où l’on broyait les graines oléagineuses pour en extraire l’huile d’éclairage. Nous pensons qu’il fallait faire venir les graines de l’extérieur (Braine-Le-Comte)

Ceci donnait aussi lieu à d’intéressantes transactions commerciales, relatives à l’éclairage dont chacun avait besoin. 

Les brasseries étaient nombreuses : le Rouge Lion, le Cerf, et la brasserie de l’Ange, celle du pont du moulin. Leur multiplicité suppose une nombreuse clientèle et une importante utilisation de matières premières. On y fabriquait de la cervoise, de la spéciale dite « Kente » et même de la blanche.

Au 15eme siècle, Michel Posty, le grand fermier du Quesnois prenait sa bière au Rouge Lion et la payait 16 sous la tonne et 20 sous le baril. Les brasseurs étaient donc des marchands de bière et le Rouge Lion en particulier car il s’était annexé une guinguette. Cela a ouvert d’intéressantes perspectives de commerce à Ronquières.

Enfin, le tissage et le filage du lin, qui nous est surtout connu pendant le 18eme siècle, mais est certainement plus ancien, nécessitait l’utilisation de matières premières qu’il fallait faire venir du dehors, ce qui nécessitait d’importantes transactions économiques.

La fin de la halle

Nous ignorons comment prit fin la halle. Il est probable que son activité déclinait depuis longtemps et que, ne répondant plus aux nécessités du jour, elle s’éteignit lentement pour cesser d’exister. Quoi qu’il en soit, au début du 18eme siècle, le mayeur Ghislain Baudet (1712) en devint acquéreur et avec l’autorisation du Seigneur éleva en son emplacement un bâtiment nouveau moyennant le paiement annuel d’un cens, d’un chapeau, comme reconnaissance des droits des seigneurs du lieu.

Le mayeur construisit des bâtiments qui selon les apparences étaient destinés à une exploitation agricole. C’est-à-dire d’un côté une grange et de l’autre une étable et autres bâtiments. Nous ignorons toutefois ce qu’en fit Ghislain Baudet qui mourut en 1712. Les  bâtiments se trouvaient à l’emplacement de la maison de Léona Gouniot et de la pharmacie).

Après Baudet, les deux catégories de bâtiments eurent une destinée différente. La grange fut d’abord occupée par Jean Druet qui avait épousé Renelde Baudet et qui était probablement la fille de Ghislain. Ensuite, François Druet en fit l’acquisition et la donna en dot de mariage à sa fille Renelde quand elle épouse la taille André Vanderelst de Virginal.  Les Druet possédaient aussi le Rouge Lion et sa guinguette. La grange et le Rouge Lion passèrent après à André Vanderelst, à son fils Jean-Joseph et après celui-ci à Jean Chrisostome. Quant à la chambre et l’étable, elles devinrent une cantine, appelée la cantine des Tison.